08/07/2004

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En finir avec le chômage

Le chômage, cette horrible machine à créer de l'exclusion, provoque de terribles ravages à travers le monde. Impensable dans une petite communauté d'Humains - chacun à sa place - il est profondément lié au système économique moderne. Aux personnes utiles qui participent à la société humaine, s'oppose des personnes inutiles qui, dit-on, "parasitent" le système. S'il existe une fracture, c'est bien la séparation chômeurs / travailleurs. Il s'agit donc d'analyser pragmatiquement les causes du chômage et de trouver les remèdes pour en finir définitivement.

Il existe principalement trois phénomènes qui contribuent, chacun à leur niveau, à créer du chômage.

Le premier phénomène vient du fonctionnement du marché. Le marché de l'emploi est, comme tout marché, un équilibre entre une offre et une demande. Or c'est un marché un peu spécial car il est au c'ur du dispositif économique, étant donnée qu'il fixe, quasiment à lui tout seul, l'inflation. L'équilibre du marché de l'emploi doit s'effectuer en limitant les tensions inflationnistes sur les salaires. Traditionnellement, les pays capitalistes résolvaient ce problème en faisant appel à de la main d''uvre étrangère dans les bassins économiques. Cette méthode a été plutôt abandonnée ces dernières années car elle crée des nombreux problèmes de société (intégration, exploitation humaine dans des pays évolués, etc). La méthode actuelle repose principalement sur le chômage. Les économistes nous expliquent ainsi qu'il faut au minimum 5 à 6 % de chômage pour que les tensions inflationnistes sur les salaires soient limitées. Ce seuil s'appelle le NAIRU (Non-Increasing Inflation Rate of Unemployment). C'est à la banque centrale de veiller à ce que le chômage reste au dessus de ce seuil, pour limiter l'inflation.

Le deuxième phénomène vient de la flexibilité. De nombreux secteurs de l'activité économique sont très volatiles. Sur un marché donné, l'offre peut exploser sur quelques mois avant de retomber dans une léthargie totale. Si on tient compte de tous les secteurs d'activités réunis, les besoins d'emplois restent stable, néanmoins de grosses fluctuations existent selon les secteurs. Si les travailleurs n'ont pas la flexibilité nécessaire pour aller vers l'activité du moment, les employeurs limitent leurs embauches pour s'adapter sur une moyenne plutôt que sur l'activité instantanée. Des travailleurs ne trouvent donc pas d'emploi, ce qui augmente au final d'environ 2 à 3 points le taux de chômage. C'est ce phénomène qui explique les disparités entre différents pays occidentaux comme par exemple le Royaume Uni qui a un marché très flexible et la France qui à un marché moins flexible. Il faut néanmoins remarquer, qu'étant donné que le système anglo-saxon fait rimer flexibilité avec précarité, qu'il est préférable d'avoir un système moins flexible avec des aides pour les chômeurs et moins précaire pour les non-chômeurs, que le système inverse - même si ce n'est peut être pas l'avis des 2 à 3% de personnes qui sont victimes du phénomène.

Enfin le dernier phénomène vient de l'utilisation des revenus dans un bassin économique (zone de forte mobilité des travailleurs). Si les revenus sont réinjectés dans la zone (via l'épargne ou la consommation), les emplois perdureront, même s'ils peuvent changer. Par contre si les revenus sont expatriés sans compensation -solde négatif -, les emplois se tariront, il n'y aura plus assez d'argent dans l'économie pour assurer tous les emplois. La contribution de ces phénomènes dépend de l'ampleur de déficit, pour la zone Euro qui avait une balance des paiements courants en 2002 excédentaire de 72 milliard de dollars, on peut l'estimer de 1 à 2 points.

Ainsi, on se rend compte que le chômage n'est pas issu d'un disfonctionnement de notre système économique. Il est, au contraire, le résultat de choix volontaires dont les décideurs se défendent comme étant un moindre mal. Ces chômeurs que l'on qualifie souvent d'inutiles sont au contraire un maillon indispensable de nos sociétés pour garantir la croissance. Leur sacrifice permet de contenir l'inflation, de garantir une sécurité d'emploi des non-chômeurs ou encore de placer son argent à l'extérieur sur des marchés plus juteux. Inutile de se lamenter devant un tel cynisme, mieux vaut trouver une solution pour sortir de cette impasse, afin d'arriver à un taux de chômage de 0%.

Pour assurer le plein emploi, il faut dans un premier temps arriver à ce que l'absence de chômage ne soit pas synonyme d'inflation. Il n'y a pas de miracle. Pour que le marché du travail ne dérégule pas le système économique quand tous les travailleurs ont un emploie, il faut limiter les salaires. A un échelon donné doit correspondre un salaire (hors prime). Des fluctuations de plus ou moins 10 % pourront être tolérées mais guère plus. Les conventions collectives qui actuellement décrivent les salaires minimums, devront s'étendre pour décrire les salaires maximum. Reste à définir les règles pour fixer minima et maxima de façon juste et viable - en utilisant, entre autre, des paramètres comme le niveau d'étude, l'ancienneté, la pénibilité du travail, les responsabilités assumées et le rapport entre l'offre et la demande. Les entreprises n'auront alors plus peur du plein emploi.

Il faut ensuite rendre les travailleurs plus flexibles, sans, bien sûr, générer de précarité. Pour cela une direction des ressources humaines nationales devra être créée afin de présenter la liste des postes à pourvoir par type de poste et lieu géographique. Les entreprises pourront ajuster leurs effectifs via des mutations extra-entreprise. Ces mutations ne devront pas modifier le statut du salarié (salaires, congés, assurances maladies et vieillesse, ancienneté). Elles devront être basée sur le double volontariat (employeur / employé). Une prime de départ (entre 4 et 8 mois de salaire par exemple) sera fourni au travailleur lors d'une mutation (plus selon l'éloignement du nouveau lieu de travail). De plus l'entreprise sera contrainte de garder une personne pour une durée minimale (environ 5 ans). Le licenciement économique ne sera autorisé que s'il y a liquidation judiciaire de l'entreprise (ce qui en terme de nombre de salariés concernés reste faible). Ainsi une fois qu'un travailleur aura trouvé son premier emploi, il bénéficiera alors de la garantie d'avoir un emploi à vie (hors cas de la liquidation judiciaire où il touchera son allocation chômage). La direction des ressources humaines devra veiller à l'emploi de jeunes et aux formations accordées tout au long de la vie professionnelle. Elle devra être motrice pour aider les projets des travailleurs (changement d'activité, besoin de financement, etc). Dans ce contexte, il n'y a pas lieu de différencier un emploi public d'un emploi privé. Le travailleur, pourra alors, pleinement se consacrer, avec l'aide de la direction des ressources humaines, à ce qu'il veut faire de sa vie professionnelle.

Enfin, pour atteindre le plein emploi, il faut définir sur une zone économique donnée (zone de mobilité) que l'équilibre doit être atteint entre le capital entrant et le capital sortant - interdire toute mobilité serait un peu trop rigide. Cette limitation des flux de capitaux est la seule chance pour des zones moins développés d'arriver à se développer. C'est d'ailleurs cette méthode qui a permis à l'Asie de rattraper son retard. C'est aussi son abandon par certain de ces pays - sous pression du FMI - qui a généré la crise asiatique - heureusement que le plus grand d'entre eux, la Chine, n'a pas suivi les consignes. Cette limitation, simple à mettre en 'uvre, permet de garantir que la richesse créée sur une zone économique sera entièrement injectée dans cette même zone.

Le plein emploi n'est donc pas un mythe. Le chômage n'est pas une fatalité. Néanmoins son éradication demande à remettre en cause le fondement de notre système économique : le marché ne serait plus forcément le meilleur régulateur. Ce serait le début d'une petite révolution. Espérons que l'inquisition économique acceptera la réalité plus rapidement que ne l'a fait l'Eglise en son temps, pour reconnaître que la terre tournait autour du soleil. Nous regarderons alors le passé avec dédain en nous disant "mais comment avons-nous pu accepter un système qui sacrifie cinq à dix pour cent de la population ?".